Tour d’Europe : semaine 3

Bilan

Nombre de kilomètres : 685km

Vitesse moyenne : 12,3 km/h

Où sommes-nous ? Rotterdam baby !

Humeur : ça va ! On est content d’avoir bouclé la première étape du voyage !

Nourriture : les Pays-Bas manquent de yaourts, et tous les fruits sont emballés dans du plastique, mais on s’en sort.

Enfant : en pleine forme ! Maxine pédale toujours aussi bien

Vélos : petite frayeur sur le follow-me, on a étrenné la capote de la Weehoo, Arsène l’a vite adoptée.

Bivouac : toujours impossible, on est heureux de quitter enfin la côte.

Journal de bord

Jour 15 / 14 juillet 2022

Petite étape, et du coup après une petite étape, tu as un peu l’impression que tu viens tout juste de démonter la tente quand tu la remontes !

Le dodo à Dunkerque a fait du bien, et on sent le besoin de récupérer ce matin, l’équipe traîne un peu au lit alors que le chef d’équipe est déjà sur le pied de guerre prêt à affronter de nouveaux kilomètres et à traverser la frontière. 

Clem a une petite forme ce matin, j’assure le rangement un peu en solo, et elle assure l’animation des enfants. Nous roulons sur une jolie voie verte pratiquement dès la sortie du camping, et ô bonheur ! Ô joie ! Il y’a des panneaux partout pour indiquer la route !

On pénètre en Belgique après une bonne pause. Au bout de quelques mètres, le dépaysement est au rendez-vous. De nouvelles enseignes (Texaco, Delhaize, etc.). Nous sommes en territoire flamand, et donc potentiellement pas trop fan de la langue française.

Nous nous arrêtons assez vite à De Panne sur une jolie place avec des fontaines idéales pour se rafraîchir. Les enfants ont un coup de barre et n’en profitent pas vraiment. Il y a un camping pas loin, on décide d’y aller. Nous aurons pédalé 18 km aujourd’hui. Les enfants trouvent leur bonheur aux château gonflable pendant qu’on installe le camp. Le camping étant complet, nous sommes au milieu des caravanes.

A leur retour, nous enchaînons les petits jeux, puis je file faire des courses. Je trouve un Lidl mais les produits proposés sont différents, c’est trop chouette le changement !

Au moment du coucher, la famille allemande à côté de nous, passe à table avec leurs enfants de 2 à 14 ans, leur musique beaucoup trop pour l’heure, et leurs joints. On arrive à tolérer, surtout Arsène qui s’endort sans problème. Pour le reste de la tribu, à 22h30 nous leur demandons de baisser, ils le font mais piano piano hein. On finit par s’endormir en ayant hâte de partir d’ici.

Jour 16 / 15 juillet 2022

« Papa, pourquoi est-ce qu’il n’y a pas que des vélos dans la ville »

La voix de Maxine est tellement innocente, sa question si naïve, mais tellement intéressante. 

« C’est une très bonne question ma puce. Je ne sais pas, mais c’est vrai que ce serait bien ! »

Quelques instants plus tôt, un conducteur dans une petite rue a trouvé utile de faire une grosse accélération pour s’insérer entre Clem et moi. Les violences motorisées ont fortement baissé depuis le passage de la frontière. C’est plus qu’agréable ! 

Nous roulons le long du front de mer ultra urbanisé au bord de plages de sable interminables. Nous ne connaissions pas du tout le littoral belge, mais nous commençons à en avoir un peu assez.

Alors que nous approchons d’Ostende, nous prenons la décision de quitter la Véloroute pour voir un peu ailleurs. Nous embarquons dans un train en direction de Bruges. La Venise du Nord a une résonance particulière pour Clem et moi puisque que c’est ici que je l’ai demandé en mariage (plus d’info sur demande). 

Ce soir nous dormons à Bruges, dans un parking de camping-car un peu à l’arrache ! En effet, nous sommes arrivés à 19h30, on a cru que c’était un camping normal mais pas vraiment. Après quelques instants de réflexions, nous décidons de profiter d’un coin d’herbe du parking entre deux haies pour camper. Le camping sauvage est strictement interdit en Belgique mais nous manquons d’option. Le camping le plus proche est à 30 minutes de vélo et l’accueil en est déjà fermé, les hôtels et les Airbnb en dernière minute sont hors de prix et pas de Warmshowers actifs. Nous laissons les vélos là et partons faire découvrir cette jolie ville aux enfants. Nous monterons la tente en rentrant, ce sera plus discret. Nous prenons les équipements de valeurs avec nous (ordi, téléphone, batterie, enceinte, go pro, etc.)

Jour 17 / 16 juillet 2022

Aujourd’hui c’est l’anniversaire de mon ami Justin. J’aurais bien aimé lui souhaiter de vive voix, mais nous devons apprendre à économiser nos données. En même temps, c’est l’Europe, du coup pas de frais en principe. 

La nuit a été agréable. Un peu flippant au début car le moindre bruit de moteur nous faisait craindre de se faire déloger, mais c’est vite passé. J’avais mis un réveil à 7h, histoire de ne pas trop s’éterniser dans l’illégalité, mais ça a été dur de bouger. Il m’a fallu 30 minutes et beaucoup de volonté pour sortir de mon duvet. Quand nous nous sommes installés hier soir à 22h30, nous n’avons rien sorti d’autre que nos duvets et tapis de sol, du coup le rangement est facile ce matin. Il se fait sous l’œil vif de petits lapins à quelques mètres de nous pour le plus grand bonheur de Maxine. Depuis notre départ, ce qui l’intéresse le plus ce sont les animaux. Entre ses escargots qu’elle stocke dans sa sacoche, et tous les chiens qu’elle croise qu’elle doit à tout prix caresser, on a vraiment une amie des bêtes avec nous !

« Mais pourquoi, ils ne pensent pas un peu plus aux vélos quand ils font les routes ? »

La question est surprenante surtout maintenant que nous sommes aux Pays-Bas. Nous roulons sur une piste de fins graviers très (très) peu fréquentée par les motorisés. Depuis notre entrée en Belgique, et encore plus depuis cette nouvelle frontière, les aménagements vélo sont légion. Il y en a partout. Des pistes réservées, des voies partagées bien délimitées, des indications régulières et claires, des priorités instaurées, etc. Mais la question demeure intéressante. Toutes les villes que nous connaissons sont pensées en priorité pour la circulation des voitures avant tout. On perce des artères pour que les moteurs puissent rejoindre le cœur des villes. 

Les pays plats sont plaisants car ils nécessitent peu d’effort, pour autant il y a le vent. Et comme aujourd’hui, quand il n’est pas avec nous, nous le sentons bien nous pousser dans le mauvais sens. Le vent, soit il est avec toi et tu ne le sens pas, soit il est contre toi et tu ne sens que ça. Il ne facilite pas la communication non plus. Le vent nous balaye et il éloigne les mots des enfants loin de nos oreilles. 

Nous sommes particulièrement contents d’avoir pris la tangente et d’être sorti de la côte hier. Nous nous en approchons à nouveau de celle-ci en fin d’après-midi, mais cette journée à pédaler au bord de canaux ombragés ou dans la campagne parsemée de moulins nous a enchantés. 

Nous trouvons refuge pour la nuit dans un grand camping à la ferme, très calme, au tarif exorbitant de 41€ la nuit…

« Je comprends mieux pourquoi tant de Hollandais viennent dans les campings français… »

La sagacité de Clem me régale. Les enfants profitent des trampolines (ceux-ci ne sont pas moches, ils sont au sol avec un trou en dessous, top !), nous installons le camp. Des petites courses à 3km, douches, dîner… Une certaine routine quoi ! Souvent, les passants nous souhaitent de bonnes vacances, mais c’est notre quotidien maintenant. Vélo, vélo, dodo. 

On essaie de se coucher tôt ce soir pour récupérer un peu de sommeil. On regarde nos cartes et songeons à modifier notre itinéraire pour éviter de longues portions de côtes. Nous allons sans doute enlever l’Espagne de notre itinéraire et remplacer la Velodyssee par la Véloroute des Pèlerins. De toute façon, pour le moment nous avançons moins vite que je ne le pensais, on sera donc obligé de faire des choix ou des raccourcis en train. C’est agréable d’avoir cette flexibilité dans notre itinéraire. Se replonger dans les cartes nous fait rêver et donne envie d’avancer. A suivre !

Jour 18 / 17 juillet 2022

Deuxième jour au Pays-Bas ! Cette fois plus de possibilité de parler français, nous parlons anglais tout le temps ! 

Réveil matinal pour moi, j’ai envie de décoller avant que le soleil ne tape trop. Il est vrai que je parle moins météo dans mes récits depuis quelques jours, mais c’est parce que c’est toujours la même : grand ciel bleu et soleil chaud ! Les enfants filent aux jeux, nous nous attelons au rangement. Toujours les mêmes gestes qui se répètent et pourtant pour le moment, aucun ennui à les refaire encore et encore tous les jours. 

Pour le moment, on ne se sent pas encore totalement voyageurs au long cours, nous sommes en vacances. Il faut dire que les conditions météorologiques et la côte n’aident pas à avoir une autre impression. 

Nous retrouvons rapidement la mer. Le nombre de cyclistes est incroyable. Les aménagements sont tellement optimaux pour les vélos que cela donne forcément envie de pédaler. Il suffit d’une volonté politique de mettre le vélo au cœur de son urbanisation pour que les gens s’y mettent ! Quel exemple pour la France ! Les Pays-Bas c’est 18 millions de vélos (plus que d’habitants) et 35 000 km de piste cyclable. Ce soir, je suis allé faire des courses au Lidl. Pas un mètre de route partagée sur les deux kilomètres pour m’y rendre. C’est fascinant. 

Nous avons fait une longue pause sur la plage ce midi. En y arrivant, nous sommes assaillis par des bêtes d’orage qui se répandent partout sur nous. Le mélange avec la sueur sur le visage les rend chatouilleux et dérangeants. Maxine adore les croque-monsieur locaux, Arsène continue de se nourrir principalement de melon. Les enfants ont bien joué dans les vagues provoquées par les nombreux porte-container qui s’enfilent dans le défilé vers le port d’Anvers. Toutes ces boîtes multicolores qui ont fait le tour du monde ont un petit côté fascinant et désespérant. Ces rubik’s cubes géants ne s’arrêtent jamais, sauf si l’un d’eux est bloqué dans un canal bien entendu. 

Nous repartons et prenons un ferry pour traverser la traversée. Clem est aux anges, elle adore les bateaux et le mal de mer qu’elle choppe à chaque fois. Les enfants aiment bien, même si Maxine rapidement nous sort sa nouvelle grande phrase : « Je m’ennuie »

Nous nous arrêtons au premier camping croisé. Il coûte cher, mais il est aussi agréable que celui de la veille. Les enfants trouvent leur bonheur avec les tracteur et kart à pédale. 

Le coucher est moins chaotique ce soir, nous arrivons à mieux cadrer les enfants ce qui les apaise (et nous aussi !). Dans quelques jours nous serons à Rotterdam, et nous aurons ainsi bouclé la première grande étape de notre voyage. Nous trouverons le Rhin et le suivrons jusqu’à Bâle pour la deuxième grande étape du voyage.

Jour 19 / 18 juillet 2022

Température ressentie dès qu’on descend du vélo : 45 degrés ! Quand je pense qu’il existe encore des personnes persuadées que le réchauffement climatique est une lubie des écologistes pour faire peur aux enfants le soir avant de se coucher. 

« Dodo maintenant ! Sinon on va te parler de l’avenir de la planète et de comment il y sera impossible de survivre parce qu’on voulait rouler dans nos gros SUV, partir en week-end à Marrakech et regarder des hommes courir après un ballon dans un stade climatisé au milieu du désert. »

La journée a bien commencé, le camping nous a coûté 15€ et non pas 50 comme je l’avais compris. Résultat, j’exulte de joie au moment du départ vers 10h30. Nous roulons à l’ombre des arbres sur des pistes cyclables. L’équilibre des vélos n’est toujours très facile à garder lorsqu’on croise d’autres vélos ou qu’on se fait doubler. Quelques particularités amusantes de nos amis européens les hollandais : 

  1. Les scooters circulent sur les pistes cyclables et ceux-ci sont très silencieux
  2. Quand ils circulent sur les pistes cyclables, les utilisateurs n’ont pas de casques
  3. Les cyclistes n’ont presque jamais de casques, sauf les enfants en très bas âge
  4. Les Hollandais ne sont pas du tout gênés de rouler deux par deux côtes à côte.
  5. Même chargés comme des mules, le Hollandais est très à l’aise sur son vélo

Nous nous arrêtons pour le déjeuner alors que nous atteignons le sommet de notre première digue. C’est impressionnant de réaliser la quantité de terre gagnée sur la mer. Nous avons trouvé un coin d’ombre, nous n’arrêtons pas de vider nos gourdes pour garder nos gosiers bien hydratés. 

Nous repartons, Arsène s’installe derrière moi. Nous avançons bien, mais qu’est-ce que la chaleur est écrasante. Nous sommes un peu surpris de voir tant d’enfants et de personnes sans chapeau sur la tête pour se protéger. 

Nous stoppons pour une pause glace vers 14h30 dans un joli petit village, bien animé par un grand marché. Les zones ombragées sont prises d’assaut. Nous décidons de pousser jusqu’au pont de la presqu’île. Il est trop tôt pour s’arrêter de rouler, d’autant plus que nous ne sommes pas sûr de trouver de l’ombre au camping. 

Nous traversons à présent des forêts apaisantes aux branches biscornues. Le fin gravier de la route est agréable sous nos pneus. Il y a de légères variations de dénivelées, on se croirait presque sur une pumptrack.

C’est tellement plaisant que cela donne envie à Maxine de pédaler seule sans qu’on lui propose. Malheureusement, le plaisir est de courte durée. Bientôt le fin gravier laisse place à une épaisse couche de gravier qui accroche nos roues et nous ralentissent. Les arbres s’espacent, La déception de Maxine grandit. La route est ensuite pavée de brique, ce qui n’est pas plus agréable que le revêtement précédent. La fatigue monte mais les températures ne baissent pas. Nous avons repéré un camping, qui semble avoir une piscine d’après les photos du site en néerlandais. Nous y plaçons beaucoup d’espoir, espérant un bon rafraîchissement et divertissement pour les enfants. Nous laissons de côté l’immense camping/village de chalets à proximité d’une plage fréquentée. En arrivant, le couperet tombe sur nos nuques nulles en néerlandais : pas de piscine ! Nous testons la plage la plus proche, gavée d’algues et dans un décor à la limite du glauque. Nous nous ravisons sur une longue douche salvatrice. Le camping est au milieu d’un champ d’éoliennes, c’est beau. Clem accuse le coup. Trop de chaleur. Elle s’allonge, je gère les enfants et la fin de journée pour qu’elle puisse retrouver ses forces. Nous savons que la journée de demain sera encore très chaude, nous nous organisons pour un départ très matinal, on vise 8h !

Le coucher se fait alors que la chaleur n’est pas encore complètement tombée mais le besoin de sommeil est important après une telle journée. Avant d’aller au lit, Clem et moi scrutons notre carte de l’Europe. Nous avançons un peu moins vite que prévu et on sait maintenant que pédaler en bord de mer n’est pas notre truc. On préfère les fleuves, les canaux ou les campagnes légèrement vallonnées. On songe à laisser de côté la partie espagnole et à revoir complètement l’itinéraire à partir de la Slovénie…

Jour 20 / 19 juillet 2022

Nous nous levons à 7h, le soleil commence déjà à chauffer. Nous replions les quelques affaires qui nous restent, puis nous sortons les enfants de leurs duvets. Pour un rapide petit dej et plier la tente. A 8h20 nous quittons le camping et prenons la direction du pont qui doit nous mener vers une autre presqu’île. Le pont est aussi un barrage hydroélectrique. Une voie est spécialement aménagée pour les véhicules de services et les vélos. Nous atteignons une île au milieu du pont. Sur celle-ci, la route est longée par de larges berges goudronnées sur lesquelles Maxine s’éclate (au sens figuré). Elle monte, redescend à toute vitesse avec des sourires qui font plaisir à voir.

« T’as vu ça maman ? Je vais super vite ! C’est super ! On dirait un skate Park ! »

Le skate Park continue pendant environ 2 km pour le plaisir de Maxine. Clem et Arsène filent droit devant. Nous retrouvons le pont. Nous sommes entourés de majestueuses éoliennes. Leurs ombres semblent vouloir nous découper. Une immense lame sombre qui s’abat sous nos roues. 

Le pont mesure 10 km. Il est à peine 10h quand nous en sortons. La chaleur monte en flèche maintenant que nous avons retrouvé la terre ferme. Nous nous arrêtons devant l’accueil d’un parcours accrobranche. Les enfants ont des étoiles dans les yeux à l’idée d’être sous les arbres pendant la canicule. L’idée nous plait aussi. Première déception, Arsène est trop petit. A défaut de grimpette, on décide de profiter du lieu pour un bon petit dej. Deuxième déception.

On se décide à rouler, conscients qu’il sera nécessaire de s’arrêter rapidement pour affronter sereinement les hautes températures. Après des courses et un dej sur un banc à l’ombre, nous trouvons refuge dans un joli camping à la ferme. Nous sommes accueillis en français, avec une citronnade fraîche, et une mandarine chacun. Nous installons à l’ombre de deux grands arbres. Il est tôt mais le lieu est chouette. Nous faisons de petites activités : dessin avec maman, construction d’une cabane pour lutin avec papa. Arsène est fier d’apprendre à se servir de la scie de notre leatherman et Maxine ravie d’apprendre à tailler en pointe un bâton. Maxine a fait un magnifique dessin bucolique et Arsène était tout heureux d’écrire le prénom de sa marraine.

La chaleur ne tombant toujours pas, les enfants trouve un peu de fraîcheur en regardant l’Age de Glace. Arsène et Maxine éclatent de rire devant les pitreries de Sid le paresseux. 

Nous finissons la journée par des douches. Clem nous prévient que le jet est vraiment très agréable et motive les enfants à se rafraichir comme elle sous une douche froide.

Le dîner est pris tôt. Les enfants ont encore de l’énergie dans leurs batteries, alors que nos piles sont à plat depuis longtemps. Ils se disputent pour un oui ou un non, pour une minute de trop sur la balançoire alors que c’est le tour de l’autre…

« Puisque c’est comme ça, je joue plus jamais avec toi ! crie Maxine sur son petit frère. »

Moins de 5 minutes plus tard : 

« Arsène ! Tu viens te balader derrière moi sur mon vélo pour jouer au taxi ? »

Le coucher est compliqué. Il fait chaud. Les enfants hollandais sont revenus de la plage et chahutent pas loin de nos enfants qu’on essaie de convaincre à se laisser emporter par le sommeil. Demain, une pluie salvatrice devrait déferler sur nous et calmer les esprits de l’équipage.

Jour 21 / 20 juillet 2022

« On n’a pas toujours dit qu’on préfère la pluie au vent ? 

-Canicule ou vent, on verra ce soir ce qu’on préfère ! »

Nous nous réveillons sous un vent à décorner les bœufs (pour connaître l’origine de l’expression, vous pouvez cliquer ici). 

Nous partons de bonne heure, avant 9h30. Le rangement le soir avant de se coucher aide à décoller vite ! Maxine est bien motivée à pédaler seule, c’est chouette. La météo est agréable. La chaleur de la canicule a laissé place à un souffle chaud, et les nuages gris annoncent des gentilles averses rafraîchissantes. 

Nous roulons entre les arbres, puis derrière la dune, et rejoignons rapidement le pont pour rejoindre une nouvelle presqu’île. Nous discutons plusieurs minutes avec des cyclistes français partis de Dieppe et en route pour Amsterdam. Nous avalons les kilomètres comme nos gourdes d’eau pendant la canicule. Maxine enchaine les montées et les descentes dans les petits chemins. 

De nombreux camping-car semblent avoir passer la nuit sur la digue. Quel intérêt ? Ce n’est pas le plus beau des décors ? Le vent souffle dans le bon sens et nous porte. Le revêtement du sol est doux, comme une impression de rouler sur du coton. Clem et les enfants inventent et se racontent des histoires. Chacun leur tour, ils inventent des histoires de famille de lutins, des trois petits lapins (création originale de Maxine inspirée librement des trois petits cochons), et autres univers fantasques qu’ils apprécient. Je roule en tête, m’assurant de l’itinéraire, ce qui est facile avec la signalisation hollandaise. J’en profite pour multiplier les vidéos avec la GoPro en espérant que j’arrive à produire une vidéo de qualité. 

Nous déjeunons sous les arbres sur une table de pique-nique. Maxine est inquiète car elle craint les tiques. Nous la rassurons en lui expliquant que ça n’arrive pas souvent de choper des tiques. J’en ai eu un seul en 36 ans, et pareil pour Clem ! Nous essuyons quelques averses pendant notre pause mais rien de décourageant. Les oies sauvages qui nous survolaient en nombre deux jours plus tôt sont amassées dans les champs.

La pluie révèle l’odeur âcre de la terre. Nous hésitons sans cesse à enlever nos manteaux et à remettre nos lunettes de soleil. La pluie laisse place à de fugaces et chaudes éclaircies.

Nous stoppons à un camping grand luxe, avec piscine. Avant d’y poser nos sacoches, j’y vais en éclaireur. Le tarif de 50,50€ pour une nuit ne nous convainc pas trop et nous lui préférons le camping à la ferme tout proche (mais 34,50€ tout de même !). 

« Bon ! Où est-ce qu’on peut planter la tente les enfants ? Il n’y a pas beaucoup de place… »

La question de Clem interloque les enfants qui observent les champs vide autour de nous. 

« Mais ! Mais, il y a plein de place ! »

Les enfants sont ravis. Pas de piscine mais des animaux !

« Papa ! Maman ! Arsène est resté à la ferme mais vous n’allez pas me croire ! Il y a des daims et une autruche ! » 

La joie de Maxine est communicative et fait plaisir à entendre.  

Nous dînons, et allons faire une petite toilette. Nous découvrons à ce moment une tique sur Maxine et une sur Arsène. Ils se déshabillent et finalement nous en décomptons une petite dizaine ! 

Retour à la tente après l’extraction. Je ne vais pas donner de détails, mais ce n’était pas hyper drôle. Espérons que l’inspection de Clémence et moi ne donne pas le même résultat !

Jour 22 / 21 juillet 2022

Nous sommes tirés du sommeil par le picotement des gouttes de pluie sur la toile de la tente. Nous sommes bercés par ce doux rythme et nous faisons une grasse matinée familiale. 

Nous prenons le petit déjeuner au sec sous la tente. Une initiation au poney à lieu juste à côté de nous. Maxine les observe avec envie. Nous lui promettons que nous essaierions de lui en faire faire le jour de son anniversaire. 

Je replie la tente sous la pluie, pas cool. Nous repartons du camping à 12h30, bien loin de nos dernières performances… avec l’humidité, Maxine retrouve ses amis les escargots sur la route, et se met en tête de sauver tous les escargots qui traversent la piste cyclable. Cela n’aide pas dans la progression mais cela la motive bien ! En plus de la pluie, nous avons le droit à du vent. 

« C’est pratique la pluie et le vent ! me lance Clem. Ça permet de réduire la taille des sacoches ! »

Nous progressons tranquillement, nous arrêtant régulièrement pour venir en aide à des escargots. Certains sont absolument gigantesques, aussi gros que deux fois mon pouce !

Ayant fini notre deuxième bouteille de gaz hier soir et n’ayant pas de provision pour le dej, nous décidons de nous arrêter dans un restaurant. Les enfants dégustent leur Tosti ham en kaas (des croque-monsieur) et nous un vrai plat chaud. C’est chouette de manger assis à une table! Les hollandais ont le bon goût de proposer des plats en petite quantité idéal pour les enfants.

Nous reprenons nos vélos avec un vent froid de face. 

« Vent de face, vente de merde! »

Cet enfoiré nous demande un effort supplémentaire à chaque coup de pédale. Maxine me demande de s’attacher alors que nous pénétrons dans l’immense zone industrielle du port Maasklavt 2. Le défilé des camions à côté de nous est incessant. Heureusement que nous sommes bien en sécurité sur notre piste cyclable. Certains n’ont aucun chargement ce qui amuse beaucoup Maxine. Nous leur crions « Au boulot ! » dès que nous en voyons un rouler à vide. La zone portuaire est envahie de containers. Alors qu’il y a quelques jours je philosophais face à UN porte-container, ce sont d’innombrables cargos de toutes tailles, de péniches, de bateau pilotes ou de camions qui s’affairent autour des boîtes rectangulaires. Le ballet des immenses grues est infini. C’est un manège de titans couleur schtroumpf. Nous arrivons au terminal de notre ferry, planté entre les grues à gauche et une centrale électrique à droite. Il s’intitule « Futureland » et vante les bienfaits de la construction gagnée sur les eaux. En tant qu’écologistes convaincus, on est moyennement convaincu par les explications. Cela fait penser au greenwashing des géants pétroliers comme Total et compagnie, mais je reste subjugué par la prouesse technique et les moyens humains mis en œuvre. 

Nous attendons notre ferry en compagnie d’autres cyclos. Il fait froid mais les enfants trouvent de nombreuses occupations. Ils jouent dans les rochers aux sauveteurs. Un bateau approche de notre ponton. Il nous paraît minuscule comparé aux ogres bariolés du port.

« Ha ha ha ! Si ça se trouve c’est notre bateau ! plaisante Clem.

-Ha ha ha ! Si c’est le cas, c’est la gerboulade assurée ! »

Le bateau se rapproche de plus en plus. Les cyclos présents nous confirment qu’il s’agit bien de notre embarcation… 

Le trajet se passe bien. Maxine est inquiète car nous avons remarqué une tique juste sous sa paupière. Nous craignons un peu qu’Arsène et son poids plume ne passe au travers des gardes corps. Nous approchons de plus près les colosses de métal aperçu plus tôt. L’un d’eux transporte d’énormes pièces métalliques qui sont les composants de la tête d’éoliennes. Un autre transporte du gaz et a de marqué sur sa coque « Gaz should always travel first class ! ». Un pétrolier nous dépasse. Les dimensions de tous ces navires nous font sentir comme des fourmis. Je pense à mes cousins qui pilotes tous les jours ces mastodontes et qui font la fierté de mon grand-père. 

Alors que nous approchons du port d’arrivée, nous apercevons un phoque à quelques mètres de nous. Soudain, le bateau tangue fortement. Mon vélo, installée a l’arrière bouge un peu trop à mon goût et j’imagine déjà mes sacoches passer par-dessus bord. Nous arrivons rapidement à terre puis au camping où une friterie nous permet de manger chaud. Plus que 29 km nous séparent de Rotterdam et de la fin de la première étape de notre voyage.

Jour 23 / 22 juillet 2022

La route pour Rotterdam est monotone. On s’en lasse rapidement. Nous traversons des zones industrielles en continue. Après avoir passé plusieurs jours dans les dunes, le changement est brutal. Notre envie d’arriver est plus importante que notre envie de pédaler. Même les nombreux cygnes sur la berge ne sont plus majestueux dans un tel décor. Une odeur d’égout nous accompagne par intermittence. Les cheminées fumantes à perte de vue sont le reflet de notre société moderne.

Nous arrivons dans la banlieue de Rotterdam. Les immeubles prennent la place des usines, et hormis des petits coins mignons et bien aménagé, l’arrivée dans la ville est triste et sans saveur. Nous le savons d’expérience que les arrivées à vélo dans les grandes villes sont loin d’être une partie de plaisir, Rotterdam ne déroge pas à la règle. 

Alors que nous sommes à 6 kilomètres du camping, Clem me crie de m’arrêter. Elle arrive jusqu’à moi en tenant la tige de la roue avant de Maxine. Celle-ci s’est arrêtée derrière. Sa roue ne tient plus. Une des deux attaches de la roue sur le Follow-me manque à l’appel. Sans cette pièce, Maxine ne peut plus s’attacher à moi et ne peut plus rouler ! Je commence déjà à imaginer comment la retrouver. Nous sommes dans une grande ville, on devrait pouvoir la retrouver dans différents magasins de cycles, mais ça plomberait notre programme. Nous marchons le long de la route où Maxine pense avoir entendu le bruit de la pièce qui tombe. Rien. Que dalle. Nada. La tige a le même diamètre que les visses GoPro, je récupère un écrou sur une des attaches de la caméra et j’arrive à sécuriser la roue de Maxine. Nous repartons dépités mais pressés de finir cette journée. Au bout de 350 mètres, je m’arrête. C’est trop con, j’ai à peine fait le chemin dans l’autre sens, la pièce perdue n’est peut-être pas si loin. Ma bonne étoile ne m’a jamais laissé tomber, même dans les pires situations. Nous décidons de nous séparer, Clem file vers le camping avec les enfants, je refais le chemin à l’envers. Je roule tout doucement en scrutant la route. Tous les vélos me doublent. Et là ! Paf ! Le miracle s’accomplit, je retrouve l’attache. Je rebrousse chemin, animé par une énergie nouvelle et avec une hâte d’annoncer la bonne nouvelle à Clem. Je les retrouve un peu avant le camping. Il est 15h30.

Le camping est juste à côté d’un club hippique, ce qui rend très envieuse Maxine. Nous avons de réelles difficultés à lui faire comprendre qu’elle ne peut pas monter à cheval. Notre fille est têtue, et quand elle a une idée en tête, la frustration qui en découle est terrible.Je pars faire des courses mais peine à trouver une bouteille de gaz. Ce soir, nous mangeons froid. Demain, nous dormons à nouveau à Rotterdam et partons explorer la ville.

3 commentaires sur « Tour d’Europe : semaine 3 »

  1. Merci encore de ce récit que nous avons toujours plaisir à lire. Bravo pour ta « bonne étoile » Marco et bonne découverte de Rotterdam !
    On voyage ainsi avec vous !
    Zoubis tout les 4 !!😘😘😘😘

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